Consanguinité du Yorkshire et utilisation des reproducteurs
Prescriptions d’élevage
L’étude approfondie des conditions optimales de reproduction dans l’espèce canine confirme souvent la nécessité de respecter un certain nombre de prescriptions zootechniques :
respecter une éventuelle pause d’élevage pour les femelles Yorkshire (dans certaines races, une pause de 9 à 10 mois entre la mise-bas et une saillie éventuelle constitue un délai parfois nécessaire).
ne pas laisser reproduire des individus trop jeunes (il convient, selon les races, d’attendre au moins l’âge de 12 à 18 mois si l’on ne souhaite pas hypothéquer l’avenir d’un reproducteur).
éviter de faire reproduire des individus trop âgés (compte tenu du fait qu’au delà de 6 à 8 ans la prolificité chute généralement de façon importante, et que les risques de complications, tels que des métropathies pour les femelles ou des syncopes pour les mâles, deviennent prédominants, il ne semble pas raisonnable de maintenir systématiquement des reproducteurs en service au delà de cet âge).
D’une façon générale, il convient de se souvenir que « si l’on travaille au delà de certaines limites, on ne peut plus obtenir les résultats escomptés ».
Le respect de ces prescriptions d’élevage, en augmentant l’intervalle de génération, limite malheureusement les possibilités d’amélioration du progrès génétique moyen, et conduit les éleveurs à rechercher une précision de sélection plus forte.
Utilisation de la consanguinité Yorkshire
La consanguinité du Yorkshire, utilisée judicieusement, peut aboutir à la production de chiens de qualité parfois exceptionnelle. Cependant, savoir l’employer, c’est également savoir limiter son utilisation, ceci afin d’éviter une diminution trop importante de la variabilité génétique intra-raciale. Lorsqu’un éleveur tra- vaille en consanguinité, il doit choisir les meilleurs chiens, réaliser les alliances les plus judicieuses, ceci afin de concentrer les qualités, et non les défauts.
Fixation des qualités du Yorkshire
« Un individu raceur est un étalon ou une lice qui, avec des partenaires différents produit une très grande proportion de produits lui ressemblant suffisamment. »
La consanguinité, par sa propriété d’augmenter l’homozygotie à tendance à fixer les caractères et à faire coïncider génotype et phénotype. Un champion d’origine consanguine aura donc plus de chances de transmettre ses gènes de qualité qu’un géniteur issus de deux chiens sans aucun lien de parenté.
En produisant par consanguinité, on peut obtenir des individus dits « raceurs », c’est-à-dire des reproducteurs ayant la propriété de transmettre à leurs descendants des caractères de façon telle que ceux-ci ressemblent plus à leur parents ou se ressemblent plus entre eux qu’habituellement.
Les origines de ce pouvoir raceur sont liées non seulement à l’homozygotie, un chien homozygote ne produisant qu’un seul type d’allèle, mais éga- lement à la dominance de cet allèle. On comprend donc qu’un reproducteur est d’autant plus raceur que ses gènes sont homozygotes et dominants.
Les descendants successifs conserveront une partie seulement des gènes de haut niveau, le phénomène raceur s’atténuant petit à petit.
Utilisation de lignées consanguines parallèles
A partir d’un géniteur d’élite, la consanguinité permet de concentrer dans les produits qui en résultent les gènes de ce sujet d’exception. Elle tend, dans ce cas, à diviser la race en familles distinctes, chacune reliée à un ancêtre remarquable dont les éleveurs ont voulu fixer les caractères.
Cet élevage en lignées consanguines est intéressant dans la mesure où l’éleveur diversifie les géniteurs souches des différentes lignées. Par ce système, ils profite des avantages de la consanguinité tout en conservant une diversité génétique intra-raciale satisfaisante. L’idéal serait qu’un ou plusieurs éleveurs de Yorkshire (en fonction du temps, de la place et des moyens de chacun), conduisent en parallèle des lignées consanguines de souches totalement indé- pendantes.
Cette méthode est cependant difficile à mettre en œuvre, d’une part du fait d’effectifs encore trop faibles, d’autre part de l’utilisation systématique quelles que soient les lignées considérées de certains reproducteurs. Comme nous l’avons déjà évoqué, la solution consiste à importer des sujets d’ori- gine totalement étrangère à celle des individus concernés. Il s’agit alors d’utiliser ces reproducteurs et leurs descendants de manière réfléchie afin de diversifier le potentiel génétique de la race, et de ne pas retomber dans une consanguinité trop importante par utilisation systématique ou mal gérée de ces individus.
La consanguinité du Yorkshire fonctionne par copies et ne permet d’obtenir que le potentiel qui existe réellement ; elle dépend donc totalement des caractères des ancêtres choisis. Elle ne peut pas apporter plus que ce que possédaient déjà les ascendants. Elle conduit donc toujours à un plateau de sélection, un individu n’étant jamais parfait, et n’apportant jamais à lui seul l’ensemble des qualités recherchées.
Il est donc fondamental de réaliser périodiquement des alliances entre chiens sans aucun lien de parenté ; c’est la « retrempe ».
Maintien de la diversité génétique intra-raciale
Bien évidemment, la consanguinité du Yorkshire, en favorisant la sélection de certains allèles au détriment d’autres, entraîne une diminution de la variabilité géné- tique intra-raciale.
En dehors du fait qu’une consanguinité mal utilisée peut provoquer l’augmentation de la fréquences des caractères indésirables au sein d’une population, il est indispensable de limiter son utilisation afin de maintenir une variabilité génétique suffisante.
Il est en effet admis que l’ensemble des qualités d’élevage (fertilité, prolificité, aptitudes à l’élevage des jeunes, robustesse) sont améliorées par les croisements (phénomène d’hétérosis associé à l’hétérozygotie), et au contraire détériorées par la consanguinité. Il faut donc savoir conserver une variabilité génétique suffisante, afin que les qualités d’élevage ne soient pas affectées ; ce sont elles qui conditionnent le maintien et la survie de la race. L’éleveur de Yorkshire devrait donc surveiller avec attention toute baisse de la prolificité des lices ou de la vitalité des chiots et agir en conséquence.
Conserver à la race un potentiel génétique suffisant lui assure également des possibilités d’évolution. Les exemples sont nombreux d’évolution du type morphologique de certaines races au cours des siècles et l’idée de variations, et donc d’évolution, est inscrite dans la notion même de race.
L’élevage et la promotion d’une race consiste donc à réaliser un juste compromis entre :
une structure génétique suffisamment homogène, permettant de fixer les caractères, en utilisant la consanguinité. et la conservation d’une certaine diversité génétique, garante de l’avenir de la race.
Ce dernier point est d’autant plus important que le nombre d’individus considérés n’étant pas très élevé, la consanguinité est déjà inévitable. Les éleveurs de Yorkshire devraient s’attacher à diversifier les origines et à ne surtout pas toujours utiliser les mêmes géniteurs sous peine d’aboutir à une impasse sans plus aucune possibilité d’évolution.
Rupture provisoire de la consanguinité du Yorkshire
Intérêts de la « retrempe »
En se rappelant que la consanguinité ne peut apporter des gènes non préexistants, et que les gènes défavorables ont autant de chance d’être transmis que les gènes favorables, on comprendra aisément que pour introduire de nouveaux gènes ou empêcher la fixation de caractères défectueux, il faut parfois faire appel à un géniteur extérieur à la famille consanguine : c’est la retrempe, au sens large.
« Le progrès génétique implique en fait l’alternance de longue phases de consanguinité, menées parallèlement, et de brèves périodes de rupture ».
En effet, il arrive un moment où toutes les qualités désirées sont fixées ; la progression est de ce fait bloquée par un plateau de sélection. L’éleveur de Yorkshire, par la retrempe, peut ainsi combiner dans son cheptel les gènes de deux lignées distinctes.
Par la même, il rompt l’homozygotie et accroît l’hétérozygotie. Les sujets résultant d’un tel croisement bénéficient du phénomène d’hétérosis avec une vigueur et une robustesse accrues. A partir de géniteurs de qualité, appartenant à des lignées consanguines différentes, la génération obtenue sera de qualité.
Maintien d’une consanguinité du Yorkshire minimale
Lorsqu’un ou plusieurs éleveurs souhaitent entretenir des lignées à partir d’effectifs relativement restreints, sans pour autant que la consanguinité n’augmente trop rapidement, il devient nécessaire de mettre en place des schémas d’accouplement parfaitement définis.
Augmentation minimale de la consanguinité du Yorkshire à court terme.
Dès 1921, Wright se penche sur l’étude des schémas singuliers d’accouplement et étudie la décroissance du taux d’hétérozygotie dans le cas de sys- tèmes plus ou moins complexes, à l’aide des coefficients de piste. En 1931, il définit le schéma présenté ci dessous, qui minimise l’augmentation de la consanguinité, dans une population ou l’effectif est égal à une puissance de 2, permettant ainsi de retarder le plus possible l’apparition d’accouplements consanguins entre individus apparentés.
Augmentation minimale de la consanguinité du Yorkshire à long terme.
On a longtemps cru qu’il n’existait pas de schéma qui pour un nombre d’individus donné, avait une décroissance du taux d’homozygotie plus faible que celle que l’on observe avec le schéma de Wright. Kimura et Crow montrent toutefois que le schéma circulaire, illustré ci dessous, est le meilleur dans l’absolu. Cependant, sa supériorité ne se manifeste que lorsque le taux d’hétérozygotie à déjà considérablement diminué.